10.1.2.5 Le nerf médian

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Questions VRAI/FAUX
1) Le nerf médian chemine dans le long du bras au contact de l’artère radiale.
2) Le nerf médian possède au total cinq branches terminales.
3) Dans le cadre du syndrome du nerf interosseux antérieur, on retrouve sur le plan clinique des douleurs au niveau du tiers supérieur de l’avant bras ainsi qu’une impossibilité à réaliser un “O” avec la pince.
4) La prise en charge chirurgicale n’est indiquée en première intention que pour les formes modérées à sévères.
5) Parmi les complications de la chirurgie du canal carpien, on peut retrouver un déficit de flexion de la pince pouce-index par lésion de la branche motrice thénarienne.
Données morphologiques
Le nerf médian est un nerf mixte provenant de deux branches principales, issues des faisceaux latéral et médial du plexus brachial.
Origine
Le nerf médian est constitué de neurofibres provenant des racines C6, C7, C8 et T1. Parfois, on retrouve des neurofibres issues de C5 (Figures M1, M2).
Le faisceau latéral du plexus brachial, après avoir donné le nerf musculo-cutané, se termine par la racine latérale du nerf médian. De même, le faisceau médial, après avoir donné les nerfs ulnaire et cutané médial du bras, se termine par la racine médiale du nerf médian.
Ces deux racines encerclent l’axe vasculaire du bras pour se réunir au niveau de sa face antéro-latérale en formant un « V » qui se trouve donc au-dessus et en dehors du nerf ulnaire, au-dessous et en dedans du nerf musculo-cutané, et en avant du nerf radial (Figure M3). Les branches terminales du plexus brachial engainent l’artère axillaire et sont en étroite relation avec la veine axillaire. L’artère axillaire forme donc un repère important pour les blocs anesthésiques de ces nerfs.
Autour de cette artère, on retrouve le nerf médian en avant, le nerf ulnaire et le nerf radial médialement et en dessous, le nerf musculo-cutané latéralement et au-dessus.
À ce niveau, le nerf médian répond au muscle coraco-brachial latéralement, en avant aux muscles grand et petit pectoral, et en arrière au muscle subscapulaire (Figure M3).
Trajet
Le nerf médian descend ensuite le long du bras dans le canal brachial, au contact de l’artère brachiale (Figures M3, M4). Le canal brachial se situe dans le sillon bicipital médial et est limité par des expansions aponévrotiques des muscles adjacents : en avant, les muscles biceps brachial et coraco-brachial et, en arrière, le muscle brachial. Le nerf médian est en rapport à ce niveau avec les nerfs musculo-cutané latéralement, ulnaire et cutanés médiaux du bras et de l’avant-bras médialement (Figures M12, M14).
Il croise l’artère brachiale au tiers inférieur du bras pour se placer médialement. Il passe alors en arrière de l’expansion aponévrotique du biceps, plaqué contre le muscle brachial (Figure M5).
Au coude, il pénètre dans la région antébrachiale antérieure en passant entre les deux chefs du muscle rond pronateur (Figure M6). Il passe alors en profondeur du fléchisseur superficiel des doigts et repose sur le fléchisseur profond des doigts pendant sa traversée antébrachiale. Il parcourt l’avant-bras dans son axe médian (Figures M7, M13, M15). À trois travers de doigts au-dessus du rétinaculum des fléchisseurs du carpe, il émerge au bord latéral du fléchisseur superficiel des doigts pour pénétrer dans la main en empruntant le canal carpien (Figures M8, M9).
Rapport vasculo-nerveux
Le nerf médian répond à l’artère axillaire en arrière de son origine.
Au bras, le nerf médian répond latéralement à l’artère brachiale à laquelle il est accolé (Figure M3).
Au coude, il surcroise en avant l’artère ulnaire avant de s’engager dans la partie médiane de l’avant-bras (Figure M5). Il répond latéralement et à distance à l’artère radiale, en arrière du muscle fléchisseur profond des doigts et du long fléchisseur du pouce et à distance à l’artère interosseuse antérieure (Figure M7). À la main, le nerf médian s’engage dans le canal carpien, où il répond médialement et à distance à l’artère ulnaire et latéralement et à distance à l’artère radiale. Il passe ensuite en arrière de l’arcade palmaire superficielle pour se diviser en branches terminales (Figure M10) .
Données morphologiques au bras et au coude
Données morphologiques au coude

Données morphologiques à l’avant bras
Données morphologiques à la main
Données morphologiques - Synthèse
Branches collatérales
Au bras, le nerf médian donne (Figure M2) :
- un rameau vasculaire pour l’artère brachiale ;
- un rameau diaphysaire pour l’humérus ;
- des rameaux articulaires pour le coude ;
- des rameaux moteurs pour les muscles de la loge antérieure de l’avant-bras, notamment épicondyliens médiaux : muscle fléchisseur radial du carpe, muscle long palmaire et fléchisseur superficiel des doigts ;
- un rameau sensitif palmaire pour la peau de l’éminence thénar et la paume de la main.
Quelques centimètres en-dessous (5 à 8 cm) du pli du coude, en passant entre les deux chefs du muscle rond pronateur, il décoche le nerf interosseux antérieur (Figure M7).
Le nerf interosseux antérieur longe la membrane inter-osseuse des deux os de l’avant-bras, accompagné de l’artère du même nom, et innerve le long fléchisseur du pouce, la portion latérale du muscle fléchisseur profond des doigts et le carré pronateur. Il donne aussi des fibres proprioceptives pour le carpe, l’articulation radio-carpienne et radio-ulnaire et se termine au niveau du poignet.
Branches terminales
Le nerf médian passe dans le canal carpien constitué en avant des os du carpe, en forme de gouttière, elle-même fermée en avant par le rétinaculum des fléchisseurs et recouverte par l’étalement du tendon du muscle petit palmaire. Le nerf médian y est accompagné en arrière par les tendons des muscles fléchisseurs de doigts entourés de leur gaine synoviale. C’est à ce niveau que le nerf se divise en ses cinq branches terminales (figure M9) :
- la branche motrice thénarienne : Le nerf abandonne en dehors la branche motrice destinée aux muscles thénariens, à une hauteur variable. Celle-ci peut parfois se détacher de la face ventrale du nerf (6 % dans la population) et se retrouve dans ce cas particulièrement exposée. Cette branche est destinée aux muscles opposant du pouce, court abducteur du pouce, au faisceau superficiel du court fléchisseur du pouce (Figure M10) ;
- le nerf collatéral palmaire latéral du pouce, destiné à l’innervation sensitive du bord latéral de sa face palmaire ;
- trois branches sensitives cutanées, dites nerfs digitaux communs des premier, deuxième et troisième espaces interdigitaux. Ces trois branches se divisent chacune en deux.
Fonction motrice
Le territoire d’innervation musculaire du nerf médian comprend le muscle rond pronateur et tous les muscles de la loge antérieure de l’avant-bras hormis le muscle fléchisseur ulnaire du carpe et la portion médiale du muscle fléchisseur profond des doigts.
Au niveau de la main, le nerf médian est chargé de l’innervation des muscles de l’éminence thénar et des lombricaux de l’index et du médius. Il assure donc la pronation de la main sur l’avant-bras, la flexion des doigts sur la main, la pince pollicidigitale et la flexion de la main sur l’avant-bras (Figure M11).
Fonction sensitive
Le territoire sensitif de ce nerf comprend toute la moitié latérale de la paume et de la face antérieure des doigts en dehors de l’axe passant par l’annulaire ; soit les faces palmaires des doigts I, II, III et la moitié radiale de la face palmaire du doigt IV. La face postérieure correspond aux phalanges distales et moyennes des mêmes doigts : I, II, III et moitié radiale du doigt IV (Figure M11).
Anastomoses
Le nerf médian réalise des anastomoses à différents niveaux :
- au bras, avec le nerf musculo-cutané, décrite comme étant la règle par certains auteurs au XIXe siècle (Debierre, 1888). De même, des anastomoses du nerf médian et du nerf ulnaire semblent fréquentes au bras (Lecrosnier et Babé). Ce type d’anastomoses peut représenter deux ou trois branches entre les deux nerfs à ce niveau ;
- à l’avant-bras, dans sa partie supérieure, avec le nerf ulnaire (anastomose de Martin-Grüber), entre les muscles fléchisseurs superficiel et profond des doigts. Celle-ci est souvent présente et explique la suppléance potentielle du nerf ulnaire pour l’innervation des fléchisseurs, lors d’une atteinte du nerf médian ;
- à la main, avec le nerf ulnaire (anastomose de Riche et Cannieu), au niveau de l’innervation des deux faisceaux du muscle court fléchisseur du pouce et avec le nerf radial sur l’éminence thénar par leurs rameaux cutanés ;
- aux doigts, avec les branches terminales de la branche superficielle du nerf radial. L’anastomose se fait donc entre les nerfs digitaux collatéraux palmaires et dorsaux.
Données morphologiques - Coupes
Données morphologiques - IRM
Pathologie
Nous avons choisi d’insister sur deux syndromes propres au nerf médian (Figure M20) :
- le syndrome du canal carpien, important de par sa fréquence ;
- le syndrome du nerf interosseux antérieur (cf. ci-après).
SYNDROME DU NERF INTEROSSEUX ANTÉRIEUR
Rappelons que le nerf médian décoche le nerf interosseux antérieur entre les deux chefs du muscle rond pronateur. Cette branche motrice innerve les muscles long fléchisseur du pouce, la portion latérale du muscle fléchisseur profond des doigts et le carré pronateur, de manière autonome.
Sa compression se produit sous l’arcade du muscle fléchisseur superficiel des doigts. Elle est responsable du syndrome du nerf interosseux antérieur, aussi appelé syndrome de Kiloh-Nevin. Ce syndrome rare ne représente que 1 % des syndromes canalaires du membre supérieur.
Étiologie
Compression : il s’agit du mécanisme principal d’atteinte du nerf interosseux antérieur. L’atteinte se situe peu après l’émergence du nerf, 5 à 8 cm en dessous de l’épicondyle médial de l’humérus, sous l’arcade du muscle fléchisseur superficiel des doigts. Ce syndrome peut être provoqué par une compression locale prolongée : sommeil, contention plâtrée, exercice physique excessif, soulèvements répétitifs de charges lourdes...
Signes cliniques
- Signes sensitifs : la douleur du tiers supérieur de l’avant- bras est fréquente, souvent par poussées de plusieurs heures, profonde, mais il n’existe aucun trouble objectif de la sensibilité, ce qui le différencie des autres atteintes du nerf médian. La douleur (85 % des cas) est de type mécanique.
- Signes moteurs : ce syndrome comporte une diminution de la force de flexion de la deuxième phalange du pouce, de l’index et du médius par atteinte du muscle fléchisseur profond des doigts et du muscle long fléchisseur du pouce. Le signe de la pince en atteste, le patient utilisant la pulpe phalangienne et non l’extrémité des doigts I et II : on voit donc apparaître une pince en forme de « bec de canard ».
Le patient ne peut réaliser un « O » par déficit de la flexion des phalanges distales. Le déficit de la pronation est plus difficile à mettre en évidence. Une atteinte partielle peut ne toucher que le fléchisseur profond des doigts.
Certaines fibres ulnaires peuvent être satellites du nerf inter-osseux et le syndrome se complète alors d’une atteinte des muscles intrinsèques de la main.
Examens complémentaires
- Radiographies du coude (bilatérales et comparatives) : elles permettent de rechercher une tuméfaction osseuse, notamment au niveau de l’épicondyle médial.
- L’électroneuromyogramme documente l’atteinte du nerf et permet d’écarter un diagnostic différentiel.
Traitement
Le premier traitement est l’immobilisation du coude. Un traitement chirurgical n’est indiqué que pour une compression évolutive documentée, après quatre mois de traitement médical bien conduit, mis en échec.
Les résultats fonctionnels sont le plus souvent satisfaisants.
Paralysie du nerf interosseux antérieur gauche se traduisant cliniquement par une atteinte du fléchisseur profond de l’index et du long fléchisseur du pouce, au niveau de la main. Le patient ne parvient pas a former un "O" avec son index et son pouce droit, par impossibilité de flexion de ces doigts en crochet (atteinte des fléchisseurs)
SYNDROME DU CANAL CARPIEN
Il s’agit d’une compression du nerf médian au poignet sous le rétinaculum des fléchisseurs, dans le canal carpien. Ce syndrome peut être provoqué par des sollicitations répétées le plus souvent dans un contexte professionnel. Des causes générales potentielles ne doivent pas être ignorées :
- grossesse ;
- causes endocrinologiques : diabète, hypothyroïdie, acromégalie, hypercorticisme ;
- maladies de surcharge : amylose, etc.
Clinique
Le patient se plaint initialement de paresthésies à prédominance nocturne dans le territoire sensitif du nerf médian.
Lorsque l’atteinte du nerf est plus évoluée, une amyotrophie des muscles thénariens se développe. Un traitement chirurgical de décompression est alors recommandé.
Il est important de noter qu’une épicondylite peut être associée dans 20 % des cas.
Les deux tests cliniques classiques comprennent :
- le signe de Tinel, reproduisant les paresthésies distales à la percussion du rétinaculum ;
- le signe de Phalen, lors de la mise en hyperflexion forcée de la main sur l’avant-bras.
On peut également effectuer un test, reproduisant les paresthésies, en gonflant un brassard pneumatique, à l’avant-bras. Celui-ci est plus rarement décrit.
Enfin, notons que l’infiltration du canal carpien peut avoir un intérêt diagnostique.
Atypies anatomiques
Nombreuses, elles entraînent des atypies du syndrome clinique. Ce sont principalement :
- un muscle long palmaire anormal avec présence de l’extrémité du corps charnu dans le canal carpien ;
- une division haute du nerf avec persistance d’une artère médiane ;
- un trajet anormal de la branche thénarienne motrice qui peut naître du côté ulnaire et traverser le rétinaculum ou son émer- gence dorsale ;
- une anastomose entre les nerfs médian et ulnaire.
Atypies cliniques
- La douleur peut s’étendre à l’avant-bras, franchement ascendante, pouvant atteindre le bras et même le cou, en imposant une névralgie cervico-brachiale.
- Les signes d’examen clinique peuvent être totalement absents.
- Une amyotrophie précoce des muscles thénariens peut dominer le tableau clinique.
- Les signes peuvent toucher le territoire du nerf ulnaire et même prédominer à son niveau.
- Des troubles trophiques peuvent être au premier plan, notamment la présence d’œdème, de troubles de la sudation.
- Un doigt à ressort est associé dans 20 % des cas.
- Une arthrose métacarpienne peut fausser partiellement les signes douloureux, de même qu’une ténosynovite.
La grossesse peut favoriser l’émergence d’un syndrome du canal carpien qui va souvent disparaître dans les jours suivant l’accouchement. L’infiltration est également une bonne solution permettant d’attendre la résolution des signes lors du post-partum.
Diagnostic différentiel
C’est particulièrement la variabilité dans la topographie des signes cliniques qui pourra nous amener à discuter :
- une radiculalgie quelle qu’en soit la cause, une névralgie cervico-brachiale témoignant d’une lésion radiculaire ;
- une agénésie congénitale des muscles thénariens.
La responsabilité d’une pathologie de voisinage : paralysie du cycliste, pouce du joueur de bowling, ténosynovites parfois associées au syndrome du défilé cervico-thoracique, syndromes canalaires autres : syndrome du canal de Guyon, affection du semi-lunaire.
Plus rarement seront évoquées une crise de goutte, une lèpre.
Traitement
L’infiltration, au-delà d’un intérêt diagnostique mentionné ci-dessus, peut avoir un intérêt thérapeutique, ou bien lorsque l’affection déclenchante paraît avoir une durée limitée (grossesse notamment), ou bien au décours d’une chirurgie controlatérale pour améliorer le confort du patient dans les formes bilatérales.
Le traitement chirurgical est indiqué en cas de concordance électro-clinique et d’échec de l’infiltration pour les formes très modérées ; il reste le traitement de choix pour les formes plus sévères.
Les complications post-opératoires surviennent principalement dans les six premiers mois : cicatrice adhérente, douleur parfois importante pour les prises de force, œdème local, douleur lors de l’appui du talon de la main. La complication post-opératoire la plus redoutable est fort heureusement rare. Il s’agit d’une lésion per-opératoire de la branche motrice thénarienne, surtout en cas de variation anatomique, responsable d’un déficit de flexion du pouce de la pince pouce-index.
Décompression chirurgicale à ciel ouvert avec ouverture du rétinaculum des fléchisseur permettant l’exposition et la libération du nerf médian (*)
Réponses
1) Faux - brachiale
2) Vrai
3) Vrai
4) Faux - seulement sévères
5) Vrai
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