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10.3.2 Chirurgie du défilé thoraco-brachial
Guillaume GADBLED

Questionnaire à choix multiples
1) Quel(s) événement(s) ne peut (peuvent) pas être déclencheur du défilé thoraco-brachial ?
A) Traumatique
B) Viral
C) Professionnel
D) Past-chirurgical
2) Sur quels points doit s’attarder à rechercher l’interrogatoire pour le diagnostic du défilé thoraco-brachial ?
A) La profession ainsi que les gestuelles répétitives
B) L’existence d’antécédents et de signes vasculaires dans l’ensemble du membre thoracique
C) L’existence de claudication médullaire
D) L’existence de cervicalgies
3) Quel(s) Test(s) clinique(s) est (sont) positif(s) dans les formes neurologiques :
A) Test d’Elvay modifié
B) Test d’Adson modifié
C) Test d’Allen
D) Test de Morley
4) Quel(s) Test(s) clinique(s) explore(nt) les formes vasculaires du défilé thoraco-brachial :
A) Test de Roos
B) Test de Wright
C) Test du Chandelier
D) Test de Morley
5) Le traitement chirurgical peut nécessiter :
A) Une ténotomie du petit pectoral
B) Une résection des malformations osseuses
C) Une neurolyse du plexus brachial
D) Une résection systématique de la première cote
Introduction
Le défilé thoraco-brachial correspond à une compression permanente ou intermittente de trois structures nobles : le plexus brachial, l’artère subclavière, la veine subclavière, au niveau de six zones : le défilé de l’appareil suspenseur de la plèvre, le défile inter-scalénique, le défilé pré-scalénique, l’espace costo-claviculaire, le tunnel sous le petit pectoral et la région antérieure de la tête humérale.
Il s’agit d’un diagnostic d’élimination, protéiforme d’où une errance diagnostique et la multiplication des intervenants.
Le défilé thoraco-brachial est la convergence de plusieurs éléments.
Il existe souvent une prédisposition des patients en raison de variations anatomiques congénitales ou acquises réduisant les différents passages :
– osseuses : côte cervicale, méga-apophyse transverse C7, hypoplasie 1°côte, cal viceux claviculaire…
– musculaires : scalènes (insertions, hypertrophiques, accessoire, …), sous-clavier (hypertrophie, aponévrose saillante, trajet, …), petit pectoral (insertion distale sur la capsule, …), muscle de Langer ou arche axillaire…
– ligamentaires : transverso-septocostal, costo-septo-costal…
– vasculaires au depart de la crosse aortique
Il existe parfois un élément déclencheur :
– post-chirurgical : rachis cervical, membre supérieur,
– traumatisme : fracture ou luxation du rachis cervical ou du membre supérieur,
– modification posturale : cyphose thoracique haute, …
– profession : surélévation des bras, protraction excessive des épaules, travail prolongé sur ordinateur…
– pratique sportive : hypertrophie musculaire, déséquilibre musculaire…
Interrogatoire
Il faut d’abord situer le patient dans un contexte, car il s’agit de patients douloureux chroniques. La profession est à connaître, mais surtout d’éventuelles gestuelles répétitives.
Il faut rechercher les antécédents traumatiques et chirurgicaux (rachis cervical, canalaire, membre supérieur), antécédents de thrombophlébites du membre supérieur.
Il faut caractériser la douleur ou les paresthésies (date de début, trajet, horaire, territoire, facteurs favorisants, facteurs de soulagement), le retentissement sur le sommeil.
Il faut demander si les symptômes actuels sont récurrents.
Il faut rechercher l’existence de cervicalgies, céphalées postérieures, irritation du nerf grand occipital, irritation du nerf supra-claviculaire, irritation du nerf scapulaire dorsal.
Il faut rechercher des signes artériels, comme la fatigabilité à l’effort du membre supérieur, les paresthésies à l’élévation du membre supérieur, la sensation de froideur ; des signes veineux comme l’œdème, l’impression de lourdeur, de paresthésies dans l’ensemble du membre supérieur.
Il faut enfin éliminer un double crush syndrome.
Examen Physique
Le patient est torse nu debout.
Il faut analyser le morphotype, l’équilibre rachidien, un abaissement des épaules, une endo-rotation des épaules, une éventuelle amyotrophie musculaire, une circulation collatérale sur un hémi-thorax.
L’examen du rachis comprend à minima :
– une analyse de sa mobilité au niveau cervical (raideur, asymétrie,…)
– la réalisation des manœuvres de Spurling et de Jackson.
L’examen de l’épaule comprend :
– une analyse globale des amplitudes articulaires de l’épaule,
– la recherche d’un éventuel conflit sous-acromial, pathologie acromio-claviculaire ou sterno-claviculaire,
– une recherche d’une dyskinésie scapulo-thoracique, c’est-à-dire que lors de la mobilisation du membre supérieur, l’examinateur devra être derrière le patient lors d’ antéflexions répétées et lors d’ abductions répétées pour rechercher un éventuel décollement de la scapula et le classifier selon la classification de KLIBER,
– la palpation de la coracoïde à la recherche d’une douleur,
– la palpation du petit pectoral, pouvant induire une douleur voire une reproduction des symptômes. La mise en tension du petit pectoral nécessite une correction de l’endo-rotation éventuelle de l’épaule et de sa ptôse éventuelle,
– la palpation du muscle sous-clavier, à la partie inférieure de la clavicule en médioclaviculaire, avec l’épaule en légère rétro-pulsion et ascension du moignon de l’épaule,
– la palpation de l’angulaire de la scapula.
L’examen de syndromes canalaires associés éventuels comprend :
– l’évaluation de la force de préhension au Jamar et de la force de la pince pouce-index au Key Pinch Test,
– l’évaluation de la sensibilité discriminative selon le test de Weber
– syndrome du canal carpien : acroparesthésies nocturnes et/ou diurnes essentiellement du pouce, index et majeur ; tests de reproduction lors la compression directe du nerf médian en amont du ligament annulaire du carpe,tests de Phalen et de Phalen inversé ; déficit de l’opposant, faiblesse de la pince termino-terminale pouce -index ;
– syndrome de compression du nerf ulnaire au coude : acroparesthésies essentiellement dans l’auriculaire ; reproduction lors de la flexion du coude ; déficit du premier inter-osseux dorsal, de l’abducteur du cinq et difficulté de réalisation du cross finger test ;
– autres syndromes canalaires si atypies (syndrome du rond pronateur, syndrome du lacertus fibrosus…)
Puis les différentes manœuvres ou tests cliniques à la recherche d’un défilé sont réalisées :
– pour les formes neurologiques, les manœuvres sont positives pour le signe d’Elvay modifié par Sanders, le signe de Morley et le test d’Adson modifié ;
– pour les formes vasculaires, les manœuvres sont positives pour le signe d’Allen, le signe de Roos, le test du chandelier, le signe de Wright ou Lord et Rosati ;
– pour les formes mixtes : signe de compression dans le seul espace costo-claviculaire selon Merle, le signe de Greenstone, test de Falconer et Weddel, test d’Adson.
La problématique de ces tests est leur spécificité et sensibilité, mais l’association de des manœuvres positives est un élément diagnostic.
Examens complémentaires
Les examens complémentaires systématiques sont :
– les radios standards du rachis cervical de face et de profil, à la recherche de méga-apophyses C7, de côte cervicale, d’hypotrophie de la première côte ;
– l’IRM du rachis cervical, pour éliminer une ou des hernies discales, une syringomyélie ;
– l’EMG, utile pour éliminer un ou des syndromes canalaires, perturbé dans les formes neurologiques avancées, parfois atteinte du nerf brachial cutané interne. Sa normalité n’élimine pas le diagnostic ;
– l’Echographie Doppler Artérielle et Veineuse, en position assise, en statique permettra de visualiser une sténose artérielle, un anévrysme artériel, diagnostiquer une thrombophlébite ou ses séquelles ; en dynamique et si possible lors des postures provoquant la symptomatologie, une compression artérielle ou veineuse en demandant de préciser la localisation (défilé interscalénique, espace costo-claviculaire, tunnel sous le muscle petit pectoral). Il s’agit de l’examen le plus discriminant, mais nécessite un opérateur sensibilisé à cette pathologie.
Les examens complémentaires à la demande :
– l’IRM plexique, malheureusement la résolution actuelle est trop basse pour mettre en évidence des brides et certaines variations anatomiques ;
– l’angio-scanner ou angio-IRM pour visualiser ou bilanter une sténose ou compression artério-veineuse mais leur principal défaut est d’être réalisé en strict décubitus dorsal, avec la contrainte du tunnel ne permettant de positionner le membre supérieur que le long du corps ou en antéflexion à 160-180° avec une endo-rotation de l’épaule ; garde un intérêt pour les variations anatomiques (par exemple pour visualiser un muscle de Langer au arche axillaire) ;
– la phlébographie dynamique peut authentifier une compression, sa localisation, ses conséquences (collatéralités, séquelles) ; la phlébographie dynamique permet aisément la rétropulsion de l’épaule et le mouvement de l’abduction pour démasquer certaines compressions dynamiques ;
– l’artériographie dynamique permet aussi d’authentifier les compressions ou complications et leur(s) localisation(s).
Traitements
Pour rappel, le plus souvent il existe une prédisposition anatomique pouvant réduire un espace où cheminent plexus brachial, artère et veine subclavières ; cet espace peut lui-même se réduire lors de certains mouvements, d’où la réversibilité de certaines compressions ; enfin il faut aussi prendre en charge le facteur déclenchant ou le contexte favorable.
Par exemple, une compression veineuse costo-claviculaire authentifiée à l’échographie doppler peut disparaître après une rééducation bien conduite.
Traitement médical
Dans un premier temps, il repose sur de la kinésithérapie associée à de l’auto-rééducation avec :
– de l’éducation posturale pour corriger un éventuel déséquilibre rachidien,
– travail de la respiration abdominale,
– massages décontracturants cervico-scapulaires,
– renforcement des muscles paravertébraux et stabilisateurs de la scapula,
– travail de l’ouverture costo-claviculaire.
Ce premier temps nécessite un minimum 2 à 3 mois, un patient motivé.
Un facteur limitant pour cette prise en charge est souvent l’hypertonie du petit pectoral.
Dans un second temps, une prise en charge en centre de rééducation spécialisé peut être nécessaire. Son intérêt réside dans une rééducation intensive, l’intervention de psychologues, d’ergothérapeutes, préparateurs sportifs et de sortir le patient de son milieu.
L’utilisation de toxines botuliniques est envisageable, mais est hors AMM. Son utilisation nécessite des injections réalisées sous échographie. La principale problématique est les muscles à cibler (petit pectoral seul ou en association aux scalènes) mais surtout la dose à injecter. L’utilisation de la toxine botulinique doit être accompagnée d’une rééducation.
Traitement Chirurgical
Le traitement chirurgical n’est envisageable qu’après épuisement du traitement médical.
Le patient doit être informé des nombreux risques liés à ce type de chirurgie.
Parfois la ténotomie du petit pectoral peut suffire, mais le plus souvent l’exploration des différents passages est nécessaire aboutissant à une neurolyse du plexus brachial, avec une scalenectomie du scalène moyen plus ou moins antérieur, avec excision des brides et muscles surnuméraires, la résection des malformations osseuses, une aponévrotomie du muscle subclavier. La résection de la première côte n’est pas toujours systématique…
S’il existe des sténoses ou anévrysmes des gestes vasculaires seront concomitants.
Les deux grandes voies d’abord sont axillaire selon ROOS ou sus- et sous-claviculaire selon Cormier.
Les suites post-opératoires peuvent être longues.
La récidive des douleurs est de 10%.
Conclusion
Le défilé thoraco-brachial est surtout diagnostiqué par l’examen clinique, après avoir éliminé les diagnostics différentiels. Sa prise en charge initiale est basée sur la rééducation. Sa prise en charge chirurgicale doit être réalisée par un opérateur ayant une bonne connaissance anatomique et surtout de sa variabilité.
Réponses
1) B
2) AD
3) ABD
4) ABC
5) ABC
Références
1. ILLIG KA, THOMPSON RW, FREISCHLAG JA, DONAHUE DM, JORDAN SE, LUM YW, GELABERT HA. Thoracic Outlet Syndrome. Second Edition. Springer Nature Switzerland, 2021.
2. MERLE M, JAGER T. Chirurgie de la Main, affections rhumatismales, dégénératives, syndromes canalaires. Elsevier Masson SAS, 2017.
3. POITEVIN LA. Bases anatomiques des syndromes compressifs cervico-thoraco-axillaires.
E-Mem Acad Natle Chir ; 20189 ; 17(2):004
4. DENGLER NF, FERRARESI S, ROCHKIND S, DENISOVA N, GAROZZO D, HEINEN C, ALIMEHMETI R, CAPONE C, BARONE DG, ZDUNCZYK A, PEDRO MT, ANTONIADIS G, KAISER R, DUBUISSON A, KRETSCHMER T, RASULIC L.Thoracic Outlet Syndrome Part I : Systematic Review of the Literature and Consensus on Anatomy, Diagnosis, and Classification of Thoracic Outlet Syndrome by the European Association of Neurosurgical Societies’ Section of Peripheral Nerve Surgery. Neurosurgery. 2022 Jun 1 ;90(6):653-667.
Documents joints
Annexe Dyskinesie scapulothoracique Défilé thoraco-brachial - PDF - 5.1 Mio
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