7 Qu’en est-il de l’impact de l’activité physique sur le risque de rupture des pathologies vasculaires neurochirurgicales ?

Charles-Henry Mallereau, M.D., François Proust, M.D. Ph.D., neurochirurgie, CHRU Strasbourg, décembre 2020

Questions

QCM 1 Incidentalomes et pathologies vasculaires neurochirurgicales :
A) Un incidentalome est une pathologie découverte de manière fortuite chez un patient asymptomatique.
B) On estime que la découverte d’une pathologie vasculaire neurochirurgicale chez un patient asymptomatique est rarissime (<0,5 %).
C) On estime que 1,8% de la population générale est porteuse d’un anévrisme intracrânien asymptomatique.
D) Le cavernome est une pathologie rare représentant moins de 0,5 % de la population.
E) Les incidentalomes exposent le patient à des répercussions psychiques et sociales.

QCM 2 Les circonstances de ruptures anévrismales.
A) L’activité sportive est une circonstance rare d’hémorragie sous-arachnoïdienne.
B) L’activité sportive représente 2,7 % des circonstances d’HSA dans la littérature.
C) Le repos représente plus de 25 % des circonstances d’HSA.
D) Le rapport sexuel est la circonstance la plus fréquente de rupture anévrismale.
E) La défécation représente 5 % des circonstances d’HSA.

QCM 3 Recommandations ?
A) L’activité sportive doit être contre-indiquée chez les patients porteurs d’un anévrisme intracrânien non traité.
B) L’activité physique doit être contre-indiquée chez les patients porteur de pathologie vasculaire neurochirurgicale, quelle qu’elle soit.
C) L’activité physique doit être encouragée chez les patients porteurs de pathologies vasculaires neurochirurgicales, toutefois elle doit être adaptée à l’état de santé du patient.
D) Il n’existe pas d’élément pour déconseiller la pratique sportive chez un patient porteur de MAV.
E) La plongée, en raison de gradient de pression élevé, doit être déconseillée en cas d’anévrisme intracrânien.

Memento

Introduction

Au cours des dernières années, la facilité d’accès à l’imagerie a entrainé la découverte de pathologies vasculaires neurochirurgicales chez des patients totalement asymptomatiques : malformation artérioveineuses, cavernomes, fistules durales ou encore anévrismes intracrâniens [1].
D’après une étude réalisée sur 2000 patients asymptomatiques, on estime que 1,8 % de la population serait porteuse d’un anévrisme intracrânien et 0,8 % porteuse d’un cavernome [1]. La découverte d’incidentalomes est à l’origine de répercussions psychiques et sociales importantes chez ces patients asymptomatiques qui sont désormais porteurs d’une maladie grave.
L’activité physique est un facteur protecteur indispensable dans la lutte contre les maladies cardiovasculaires [2]. Il n’existe actuellement aucune recommandation concernant l’activité sportive et les pathologies vasculaires cérébrales. Le principe de précaution a entrainé certains praticiens à déconseiller voire contre-indiquer la pratique sportive chez les patients porteurs de malformations vasculaires. Toutefois, quel est l’impact de l’activité sportive sur la rupture des pathologies vasculaires neurochirurgicales selon la littérature ?

Anévrismes intracrâniens
Une revue de littérature a permis d’extraire 1988 patients dont les circonstances d’hémorragies sous-arachnoïdiennes étaient accessibles [3,4,5,6,7]. La prévalence calculée à partir de ces données a permis d’estimer que l‘activité sportive représente 2,7 % des circonstances d’HSA. A contrario, le repos représente 27,3 % des circonstances de ruptures hémorragiques. Le rapport sexuel et la défécation, circonstances largement décrites dans la littérature, représentent 3,9 % et 6,7 % respectivement. L’activité physique apparaît comme une circonstance rare de rupture hémorragique, au faible impact.
Concernant les facteurs prédisposants, aucun type de sport n’a pu être isolé. En revanche, l’intensité semble essentielle avec une proportion d’activité modérée à intense représentant 89 % des activités physiques responsables de rupture (score de MET 6 : seuil standard dans les maladies cardiovasculaires[8] ). Les caractéristiques de la population affectée retrouvaient un âge inférieur à 60 ans (67%), une prédominance masculine (Ratio H/F : 1,38) et un tabagisme actif fréquent (67,1%). Il n’existait pas d’élément suffisant pour isoler des caractéristiques morphologiques ou topographiques anévrismales.

Cavernomes cérébraux
Joseph et al. en 2020 n’ont pas mis en évidence d’augmentation significative des récidives de saignement en fonction de la pratique d’une activité sportive chez les patients porteurs de cavernomes [9]. La pratique d’une activité physique, allant d’une simple marche à pied au sport de contact, n’a pas été mise en évidence comme un risque hémorragique supplémentaire. De plus, l’activité physique concernait seulement 6,5% des circonstances de survenue des hémorragies initiales.

Malformations artérioveineuses et fistules durales
Il n’existe pas d’élément suffisant dans la littérature pour évaluer l’impact de l’activité sportive sur la rupture de ces pathologies vasculaires.

Sport de contact, plongée sous-marine et vol aérien
Il n’existe pas d’élément dans la littérature analysant l’impact des sports de contact, de la plongée ou du vol aérien sur la rupture des pathologies vasculaires cérébrales neurochirurgicales.

Pathologies vasculaires neurochirurgicales traitées
Il n’existe pas d’élément suffisant dans la littérature concernant l’impact de l’activité physique sur la rupture des pathologies vasculaires neurochirurgicales déjà traitées (traitement endovasculaire ou chirurgical).

Conclusions
Il n’existe actuellement aucun élément dans la littérature pour déconseiller ou contre-indiquer l’activité sportive chez les patients porteurs d’anévrismes intracrâniens ou de cavernomes cérébraux (niveau de preuve 4). Il n’existe pas d’élément dans la littérature évoquant l’impact des sports de contact, de la plongée ou du vol aérien sur la rupture des pathologies vasculaires cérébrales neurochirurgicales. Il n’existe pas non plus d’élément sur les pathologies déjà traitées (traitement endovasculaire ou chirurgical).

Recommandations

Il n’existe pas d’élément scientifique pour déconseiller l’activité sportive chez les patients porteurs de malformations vasculaires.
L’activité sportive, facteur protecteur des maladies cardiovasculaires, doit être encouragée et adaptée à chaque patient, sans intensité extra physiologique.

Réponses QCM

QCM 1 Réponses vraies ACE

QCM 2 Réponses vraies ABC

QCM 3 Réponses vraies CD

Littérature marquante

Incidental findings on brain MRI in the general population.
M-K. Vernooij et al. NEJM 2007

Entre 2005 et 2007, une IRM cérébrale a été réalisée chez 2000 patients de la population de la Rotterdam Study. Ces patients étaient asymptomatiques et l’imagerie était réalisée à la recherche de pathologies cérébrales. Les résultats ont mis en évidence 35 anévrismes (1,8%) et 7 cavernomes (0,4%). L’accessibilité à l’imagerie ces dernières années a entrainé la découverte croissante d’incidentalomes qui posent aujourd’hui la question du traitement et de l’accompagnement des patients.

Subarachnoid Haemorrhage and Sports.
Sousa Nanji et al. Cerebrovascular Disease Extra 2015.

Cette analyse rétrospective monocentrique entre 1995 et 2014 a étudié 738 patients hospitalisés pour hémorragie sous-arachnoïdienne. Parmi ces patients, seuls 9 pratiquaient une activité sportive au cours de la rupture hémorragique (1,2%). A contrario, le repos représentait 21,2 % des circonstances d’HSA. Aucun facteur prédisposant n’a été isolé, ni le sport, ni les facteurs de risque cardiovasculaires. La population touchée semblait plus jeune dans le groupe activité sportive (moyenne de 43,1 ans) que dans le groupe autres circonstances (moyenne 57 ans).

The influence of physical activity on cavernous malformation hemorrhage.
Joseph NK et al. Journal Stroke Cerebrovascular Disease. 2020 apr.

195 patients présentant des cavernomes intracrâniens radiologiquement confirmés ont participé à un registre prospectif afin d’évaluer l’impact de l’activité physique sur l’incidence d’un évènement hémorragique. Il n’existait aucune différence significative entre les patients ne réalisant qu’une marche modérée à ceux pratiquant un sport de contact ou un jogging 3 fois par semaine.

Références

[1] M-K. Vernooij, M-A. Ikram, H-L. Tanghe, A. Vincent, A. Hofman, G-P. Kestin, W-J. Niessen, M. Breteler, A. Van Der Lugt. Incidental findings on brain MRI in the general population. NEJM 2007
[2] S-W. Jeong, S-H. Kim, S-H. Kang, H-J. Kim, C-H. Yoon, T-J. Youn, I-H. Chae. Mortality reduction with physical activity in patients with and without cardiovascular disease. European Heart Journal 2019
[3] Fann JR, Kukull WA, Katon WJ, Longstreth WT. Physical activity and subarachnoid haemorrhage : a population based case-control study. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2000
[4] Matsuda M, Watanabe K, Saito A, Matsumura K, Ichikawa M. Circumstances, Activities, and Events Precipitating Aneurysmal Subarachnoid Hemorrhage. J Stroke Cerebrovasc Dis 2007
[5] Anderson C, Ni Mhurchu C, Scott D, Bennett D, Jamrozik K, Hankey G. Triggers of Subarachnoid Hemorrhage : Role of Physical Exertion, Smoking, and Alcohol in the Australasian Cooperative Research on Subarachnoid Hemorrhage Study (ACROSS). Stroke 2003
[6] Vlak MHM, Rinkel GJE, Greebe P, van der Bom JG, Algra A. Trigger factors and their attributable risk for rupture of intracranial aneurysms : a case-crossover study. Stroke 2011
[7] Sousa Nanji L, Melo TP, Canho P, Fonseca AC, Ferro JM. Subarachnoid Haemorrhage and Sports. Cerebrovasc Dis Extra 2015 ;
[8] Mendes M de A, da Silva I, Ramires V, Reichert F, Martins R, Ferreira R, et al. Metabolic equivalent of task (METs) thresholds as an indicator of physical activity intensity. PLoS ONE 2018.
[9] Joseph NK, Kumar S, Lanzino G, Flemming KD. The influence of physical activity on cavernous malformation hemorrhage. Journal Stroke Cerebrovascular Disease. 2020 apr.

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