3. Recommandations en hygiène hospitalière

Evelyne EMERY, M.D., Ph.D., CHU Caen (résumé de la conférence du Pr O Traoré, CHU Clermont Ferrrand), Décembre 2021

QCM

A. La qualité de l’air dans un bloc dépend uniquement du système de traitement de l’air
B. La désinfection des mains du chirurgien avec une solution hydro-alcoolique est microbiologique plus efficace qu’avec un savon antiseptique
C. Sur une peau visuellement propre, la détersion antiseptique au Bloc n’est pas obligatoire
D. L’antiseptie au Bloc doit être effectuée avec un antiseptique alcoolique
E. Un patient porteur de VIH doit passer en dernier dans le programme opératoire

Mémento

Les recommandations en hygiène hospitalière pour diminuer le taux d’incidence des infections du site opératoire (ISO) reposent sur peu d’études de haut niveau de preuves tant ces études sont difficiles à mener en raison de l’intrication de plusieurs paramètres et variables individuels. Rappelons que les infections du site opératoire sont autant liés à des facteurs de risque intrinsèques liés au patient (immunité, comorbidité, tabac..) et des facteurs extrinsèques.

Ainsi seront résumés çi après les principales recommandations assez consensuelles actuellement en hygiène hospitalière.

La préparation du chirurgien :

L’hygiène chirurgicale des mains avec les produits hydroalcooliques préférentiellement aux savons repose sur des études faisant état d’une meilleure efficacité microbiologique, d’une rapidité d’action et d’une facilité d’utilisation avec une meilleure tolérance cutanée sans forcément prouver un impact significatif sur le taux d’ISO. Le double gantage est recommandé avec un changement régulier des gants tous les 90 à 120 minutes et entre les étapes de l’intervention, en particulier lors de la manipulation d’implants. La casaque chirurgicale est en matière non tissé, imperméable. L’utilisation de surchaussures ne fait pas état d’un impact sur le taux d’ISO. Le port de masque est recommandé tout comme la protection des cheveux par une coiffe (type calot ou cagoule plus efficace que charlotte) car les cheveux sont des réservoirs de staphylocoques.

La préparation du patient :

La préparation par au moins une douche avec un savon antiseptique moussant (type poviodine moussante) et un shampoing intégré quand le cuir chevelu est concerné par la chirurgie. Il n’y a pas de recommandations sur le nombre de douches ni sur le timing de la douche avant l’intervention chirurgicale. La gestion de la pilosité et des cheveux doit faire appel à la tonte sans recommandation claire sur le moment de la dépilation. Le rasage est interdit. L’antiseptie au bloc se fait par un antiseptique alcoolique (PVPI ou CHX). Il n’est pas établi de recommandations sur le dépistage/décolonisation de staphylococus aureus pour la chirurgie prothétique. En post opératoire, la réfection des pansements doit être faite avec du sérum physiologique avec un changement régulier. Il n’y a pas de preuve de supériorité de pansement occlusif absorbant ou pansement imprégné d’antiseptique.
Video : Règles, protocoles et recommendations du médecin hygiéniste hospitalier.
Ousmane Traoré.

L’environnement opératoire :

L’antibioprophylaxie a une influence positive pour réduire le taux d’ISO pour la plupart des actes opératoires en neurochirurgie et fait état de recommandations de la SFAR .

La durée de l’intervention > 75ème percentile a une influence sur le taux d’ISO.

Les champs adhésifs imprégnés d’antiseptiques (de type Ioban®) auraient une efficacité pour réduire le taux d’ISO ; les champs adhésifs non imprégnés ont un effet délétère sur le taux d’ISO. L’irrigation antiseptique per opératoire ne repose sur aucune preuve d’efficacité. Il n’y a aucune preuve d’efficacité concernant l’utilisation de sutures imprégnées ou d’implants imprégnés d’antimicrobiens (de type cathéter de dérivation ventriculaire).

Le traitement de l’air en salle d’intervention ne fait pas état de recommandations spécifiques pour la neurochirurgie ni la chirurgie prothétique sachant que l’intérêt du flux laminaire est remis en question. Par contre, le nombre de personnes présentes en salle d’intervention tout comme le flux ou passages de personnes ont un impact sur le taux d’ISO.

L’organisation du programme opératoire ne fait pas état de recommandations spécifiques à la neurochirurgie même s’il y a une tendance à proposer les chirurgies prothétiques en première position. La préparation de la table d’instrumentation ne doit pas précéder l’installation définitive du patient et le champage doit être rigoureux car c’est l’étape la plus à risque de contamination particulaire. Les boites d’implants doivent être ouvertes juste avant leur utilisation car il est montré que la durée d’exposition des instruments est corrélée avec le taux de contamination (4% après 30 minutes, 15% après une heure, 30% après 4 heures). Il est recommandé une plus grande rigueur quant à l’utilisation en salle d’intervention des ordinateurs, tablettes et téléphones portables qui sont sources de contamination et dont il faut prévoir les modalités de désinfection.

En conclusion, les sociétés savantes internationales d’hygiène hospitalière entretiennent constamment une analyse critique des pratiques pour faire évoluer les comportements et apporter de nouvelles recommandations afin d’avoir un impact positif sur le risque d’ISO. La tendance est à la simplification des protocoles tout en évaluant leur pertinence médico économique.

Points forts

La rigueur à la préparation de la chirurgie a un impact sur le risque de survenue d’une ISO.

Points faibles

Aucune recommandation forte sur des mesures individuelles ne fait force, tant des paramètres multiples interviennent dans la survenue d’une ISO. Des études futures sont nécessaires.

Réponse au QCM

B, C, D

Références

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Ressource pédagogique

JNE 2019 conférence du Pr Traore

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