4.3.1 Les Malformations Artérioveineuses (MAV) Cérébrales : physiopathologie, épidémiologie, et histoire naturelle.

Elsa MAGRO, M.D., Ph.D., Service de Neurochirurgie, CHU Brest, mai 2020

Questions

Concernant les malformations artérioveineuses cérébrales, il est vrai que :
1. Ce sont les seules malformations vasculaires à se caractériser par la présence d’un shunt artérioveineux.
2. C’est l’absence d’interposition de lit capillaire entre artères et veines qui est à l’origine du shunt artérioveineux.
3. Le shunt artérioveineux est situé en position intraparenchymateuse.
4. Le shunt artérioveineux a lieu au sein d’un amas de vaisseaux anormaux : « le nidus ».
5. Elles se drainent par une ou plusieurs veines qui sont dites artérialisées et sont visualisées au temps artériel en artériographie.

Sur la physiopathologie des MAV cérébrales, il est vrai que :
1. Les malformations artérioveineuses sont des anomalies congénitales visibles en IRM fœtale.
2. Des cas de MAV de novo, apparues chez l’adulte ont été rapportés.
3. De rares mutations génétiques ont été identifiées dans cette pathologie.
4. Ces mutations génétiques entraineraient une modification des facteurs pro-angiogéniques.
5. Les MAVs sont une maladie dite : « congénitale à expression retardée ».

Concernant l’épidémiologie des MAV cérébrales, il est vrai que :
1. Les malformations artérioveineuses sont une pathologie du sujet âgé.
2. Les femmes sont plus souvent porteuses d’une MAV que les hommes.
3. On estime à 8000 le nombre de nouveaux cas de MAV symptomatique diagnostiqué chaque année en France.
4. L’Incidence annuelle de découverte d’une MAV symptomatique est évaluée à 1/100 000.
5. On découvre fortuitement en IRM environ 1.4/1 000 cas de MAV par an.

Sur l’histoire naturelle des MAV cérébrales, il est vrai que :
1. Le mode de révélation le plus fréquent est la survenue d’une crise comitiale inaugurale.
2. La rupture d’une MAV est la cause de 25% des AVC hémorragiques chez patients de moins de 50 ans.
3. Le facteur de risque de rupture d’une MAV le plus clairement identifié est la survenue d’une hémorragie préalable.
4. Une volumineuse MAV corticale aurait plus de risque hémorragique qu’une petite MAV profonde.
5. Le drainage veineux profond est un facteur de risque identifié de rupture de MAV.

Memento

Article ENCYCLOPEDIA NEUROCHIRURGICA 2015, Atos de SOUZA
Les malformations artérioveineuses cérébrales (MAV) sont comme les fistules artérioveineuses durales caractérisées par la présence d’un shunt artérioveineux. Dans le cas des MAV ce shunt a lieu au sein d’un ‘nidus’ qui est intraparenchymateux. C’est la persistance d’une connexion anormale entre artères et veines, sans interposition de lit capillaire, qui est responsable du shunt-artérioveineux Vidéo : MAV, fistules piales et FAVD : transition ? notion de shunt arterioveineux. Pierre-Hugues ROCHE, DIU Vasculaire, 2021.. Les afférences artérielles se jettent dans un amas de vaisseaux anormaux, ‘le nidus’, qui se draine ensuite par une ou plusieurs veines dilatées dites artérialisées. La présence d’un shunt artérioveineux les distingue d’autres malformations vasculaires intracrâniennes, et celle du nidus des autres types de shunt artérioveineux et notamment les fistules artérioveineuses durales pour lesquelles le shunt se situe dans la dure-mère et non dans le parenchyme cérébral.

Vidéo : MAV, genèse et développement, Elsa Magro. DIU Vasculaire, 2021.
La pathogénèse des MAV cérébrales est encore aujourd’hui source de controverses et de spéculations (Achrol 2009). Les MAV ont longtemps été considérées comme des anomalies congénitales. Plusieurs hypothèses relativement proches étaient évoquées : une persistance de réseaux artérioveineux précédant la formation des capillaires, ou une malformation des capillaires se développant entre le stade embryonnaire et les premiers mois de la vie ex-utero. Puis, suite au report d’un certain nombre de cas de MAV de novo, et considérant le faible nombre de cas de MAV découverts durant cette période malgré le recours de plus en plus fréquent à la résonance magnétique fœtale et à l’échographie 3D, la nature congénitale des MAV a été remise en question (Morales-Valero 2014).
L’hypothèse d’une agénésie totale ou du faible développement du réseau capillaire était celle proposée depuis le début du siècle dernier, et fut réfutée par Yazargil considérant que cela aurait conduit à un territoire avasculaire, le développement des artérioles et des veinules étant lié à la présence des capillaires, et évoquant plutôt une maladie locale ou régionale des capillaires entrainant un recrutement de vaisseaux environnant puis une croissance autonome (Yazargil M, Book 1987). Lajaunias évoquait une vulnérabilité temporaire de structures vasculaires à des facteurs déclenchant multiples : mécaniques, thrombotiques, hémodynamiques, thermiques, ischémique/hypoxiques et inflammatoires : entrainant un remodelage de la jonction capillaire/veines (Lajaunias 1997).
Plus récemment, il a été montré que de nombreuses mutations génétiques (plus de 800 gènes identifiés) pouvaient être impliquées (Rangel-Castilla 2014), dont la voie RAS-MAPK (Barbosa Do Prado 2019). Ces mutations génétiques entraineraient des modifications des facteurs pro-angiogéniques (notamment : VEGF, TGFB, BFGF, Angiopoietine, HIF) secrétés par la MAV lui conférant un potentiel de croissance spontanée. Une élévation du taux de facteurs pro-inflammatoires, tels la Matrix Metalloproteinase 9 et l’interleukine 6, ont également été rapportées (Moftakhar 2009). Ainsi, l’hypothèse d’une maladie congénitale dite « à expression retardée », associant des facteurs génétiques et biologique apparaît probable, même si de nombreux questionnements demeurent (Young 2004).

Épidémiologie

Les MAV sont des lésions rares, et si leur prévalence selon les séries autopsiques est proche de 10/ 100 000, l’incidence annuelle de la découverte d’une MAV symptomatique est évaluée à 1/100 000 (Berman 2000, Al-Shahi 2003), ce qui représente environ 600 à 800 patients par an en France. Suite au développement et à l’accessibilité de l’imagerie cérébrale, la découverte d’une MAV non symptomatique sur une imagerie cérébrale réalisée pour le bilan de symptômes non liés, a presque doublé avec actuellement un taux de détection en imagerie évalué à 1,4/100 000 par an (Gabriel 2010). Le diagnostic d’une MAV symptomatique est fait le plus souvent avant l’âge de 40 ans, sans disparité homme/femme et sans prédominance ethnique.

Histoire Naturelle

Vidéo : Histoire naturelle, angioarchitecture, ARUBA par François PROUST
Le mode de révélation d’une MAV le plus fréquent est la survenue d’une rupture pour 40-50% des cas. Le diagnostic suite à une crise comitiale inaugurale est observé dans 20-35% des cas, et de façon plus rare, un déficit neurologique focal ou la survenue de céphalées peuvent mener au diagnostic (Stapf 2006).
Le risque principal des MAV est la survenue d’une rupture entrainant une hémorragie intracrânienne (intraparenchymateuse, sous-arachnoïdienne ou intraventriculaire), avec un risque annuel de rupture estimé à 2,2% pour les MAVs non rompues et 4.4% pour les MAVs rompues (Goldberg 2018, Gross 2013). Le taux de patients pour lesquels le diagnostic de MAV est posé sur une hémorragie initiale est estimé à 0.5/100 000, ce qui représente environ 300 nouveaux cas par an en France. La rupture d’une MAV est l’étiologie en cause dans 2 à 4% des AVC hémorragiques diagnostiqués tous âges confondus (Osbun 2017) et 25% de ceux-ci chez le sujet de moins de 50 ans (Cordonnier 2010). Le taux de mortalité ou de persistance d’un handicap invalidant (avec score de Rankin modifié supérieur ou égal à 3) est de 40% à 1 an de la survenue d’une hémorragie intraparenchymateuse par rupture de MAV (Van Beijnum 2009). La découverte de la MAV suite à une hémorragie est un facteur de risque de rupture ultérieure de la MAV, avec un risque qui serait plus élevé notamment durant les deux premières années (Hernesniemi 2008, Kim 2014, Gross 2013).
Certaines caractéristiques angioarchitecturales (l’angioarchitecture d’une MAV fait référence aux caractéristiques des afférences artérielles, du nidus et des veines de drainage) ont été décrites comme étant associées au risque de saignement. Les facteurs de risques angioarchitecturaux de rupture des MAV cités dans la littérature sont le plus souvent de nature statistique : on parle notamment de la présence d’un anévrisme pré- ou intranidal, d’une sténose veineuse, de la localisation profonde ou infratentorielle de la MAV, de la présence d’un drainage veineux exclusivement profond ou se faisant par une veine unique (Hernesniemi 2008, Stapf 2006, Gross 2013, Kim 2014).

Points forts
 L’hypothèse d’une maladie congénitale dite « à expression retardée » apparaît probable.
 Dans cette hypothèse associant des facteurs génétiques et biologique, des thérapies nouvelles pourraient émerger.
 La rupture d’une MAV est le mode de révélation symptomatique le plus fréquent.
 Il est clairement établi que le risque rupture est majoré après une rupture initiale.

Points faibles et incertitudes
 La pathogénèse des MAV demeure incomplètement élucidée.
 Le nombre de découverte fortuite en imagerie est croissant, avec en parallèle une incertitude persistante sur la ou les meilleures modalités de prise en charge, rendant l’information à donner à ces patients complexe.
 Il s’agit d’une pathologie rare et très hétérogène, ces deux caractéristiques rendant complexe l’analyse de la littérature au sujet de cette pathologie

Réponses aux questions

Concernant les malformations artérioveineuses cérébrales, il est vrai que :
1. Ce sont les seules malformations vasculaires à se caractériser par la présence d’un shunt artérioveineux.
2. C’est l’absence d’interposition de lit capillaire entre artères et veines qui est à l’origine du shunt artérioveineux.
3. Le shunt artérioveineux est situé en position intraparenchymateuse.
4. Le shunt artérioveineux a lieu au sein d’un amas de vaisseaux anormaux : « le nidus ».
5. Elles se drainent par une ou plusieurs veines qui sont dites artérialisées et sont visualisées au temps artériel en artériographie.
Réponses : 2, 3, 4, 5

Sur la physiopathologie des MAV cérébrales, il est vrai que :
1. Les malformations artérioveineuses sont des anomalies congénitales visibles en IRM fœtale.
2. Des cas de MAV de novo, apparues chez l’adulte ont été rapportés.
3. De rares mutations génétiques ont été identifiées dans cette pathologie.
4. Ces mutations génétiques entraineraient une modification des facteurs pro-angiogéniques.
5. Les MAVs sont une maladie dite : « congénitale à expression retardée ».
Réponse : 2, 4, 5

Concernant l’épidémiologie des MAV cérébrales, il est vrai que :
1. Les malformations artérioveineuses sont une pathologie du sujet âgé
2. Les femmes sont plus souvent porteuses d’une MAV que les hommes
3. On estime à 8000 le nombre de nouveaux cas de MAV symptomatique diagnostiqué chaque année en France
4. L’Incidence annuelle de découverte d’une MAV symptomatique est évaluée à 1/100000
5. On découvre fortuitement en IRM environ 1.4/1 000 cas de MAV par an.
Réponses : 4

Sur l’histoire naturelle des MAV cérébrales, il est vrai que :
1. Le mode de révélation le plus fréquent est la survenue d’une crise comitiale inaugurale.
2. La rupture d’une MAV est la cause de 25% des AVC hémorragiques chez patients de moins de 50 ans.
3. Le facteur de risque de rupture d’une MAV le plus clairement identifié est la survenue d’une hémorragie préalable.
4. Une volumineuse MAV corticale aurait plus de risque hémorragique qu’une petite MAV profonde.
5. Le drainage veineux profond est un facteur de risque identifié de rupture de MAV.
Réponses : 2, 3, 5

Références commentées

Achrol AS, Guzman R, Varga M, Adler JR, Steinberg GK, Chang SD : Pathogenesis and radiobiology of brain arteriovenous malformations : implications for risk stratification in natural history and posttreatment course. Neurosurg Focus 26:E9, 2009
Il s’agit d’un article faisant notamment une synthèse sur les hypothèses de la pathogenèse des MAVs, les facteurs biologiques et génétiques impliqués, et qui donne de nombreuses références sur ces sujets.

Morales-Valero S, Bortolotti C, Sturiale C, Lanzino G : Are parenchymal AVMs congenital lesions ? Neurosurg Focus 37:1–6, 2014
Il s’agit d’une revue des cas de MAVs de novo rapportés dans la littérature, et discutant de fait les différentes hypothèses/phénomenes physioptahologiques possiblement impliqués dans la pathogénèse des MAVs.

Rangel-castilla L, Russin J, Martinez-del-campo E, Soriano-baron H, Spetzler R, Nakaji P : Molecular and cellular biology of cerebral arteriovenous malformations : a review of current concepts and future trends in treatment. Neurosurg Focus 37:1–7, 2014
Revue sur les concepts « émérgents » concernant les mecanismes moléculaires et cellulaires qui seraient à l’origine de la formation des MAVs, avec hypothèses sur les traitements qui pourraient être developpés a patir de ces connaissances.

Gross BA, Du R : Natural history of cerebral arteriovenous malformations : a meta-analysis. J Neurosurg 118:437–43, 2013
Il s’agit d’une méta-analyse portant sur les données de l’histoire naturelle des MAV et notamment le taux de rupture et les facteurs de risque de survenue d’une hémorragie.

Références bibliographiques

Yazargil M. : Microneurosurgery, Volume IIIA : AVM of the Brain, History, Embryology, Pathological considerations, Hemodynamics, Diagnostic Studies, Microsurgical Anatomy. Georg Thie., New York, 1987

Lasjaunias P : A revised concept of the congenital nature of cerebral arteriovenous malformations. Interv Neuroradiol 3:275–81, 1997
Barbosa Do Prado, L., Han, C., Oh, S. P., & Su, H. Recent Advances in Basic Research for Brain Arteriovenous Malformation. International Journal of Molecular Sciences, 20(21), 8–11. 2019
Young WL, Yang G-Y : Are there genetic influences on sporadic brain arteriovenous malformations ? Stroke 35:2740–5, 2004

Moftakhar P, Hauptman JS, Malkasian D, Martin N a : Cerebral arteriovenous malformations. Part 1 : cellular and molecular biology. Neurosurg Focus 26:E10, 2009

Osbun JW, Reynolds MR, Barrow DL. Handbook of Clinical Neurology, Vol. 143 (3rd series) Arteriovenous and Cavernous Malformations R.F. Spetzler, K. Moon, and R.O. Almefty, Editors, 2017 Elsevier

Berman MF, Sciacca RR, Pile-Spellman J, Stapf C, Connolly ES, Mohr JP, et al. : The epidemiology of brain arteriovenous malformations. Neurosurgery 47:389–396. 2000
Al-Shahi, R., Bhattacharya, J. J., Currie, D. G., Papanastassiou, V., Ritchie, V., Roberts, R. C., Sellar, R. J., Warlow, C. P., & Scottish Intracranial Vascular Malformation Study Collaborators. Prospective, Population-Based Detection of Intracranial Vascular Malformations in Adults : The Scottish Intracranial Vascular Malformation Study (SIVMS). Stroke, 34(5), 1163–1169. 2003.
Cordonnier, C., Klijn, C. J. M., Van Beijnum, J., & Al-Shahi Salman, R. Radiological investigation of spontaneous intracerebral hemorrhage : Systematic review and trinational survey. Stroke, 41(4), 685–690. 2010
Gabriel RA, Kim H, Sidney S, McCulloch CE, Singh V, Johnston SC, et al. : Ten-Year Detection Rate of Brain Arteriovenous Malformations in a Large, Multiethnic, Defined Population. Stroke 41:21–26, 2010

Goldberg J, Raabe A, Bervini D. Natural history of brain arteriovenous malformations : Systematic Review. Journal of neurosurgical sciences. 62 (4):437-43. 2018.

Van Beijnum, J. ; Lovelock, C.E. ; Cordonnier, C. ; Rothwell, P.M. ; Klijn, C.J. ; Salman, R.A. Outcome after spontaneous and arteriovenous malformation-related intracerebral haemorrhage : Population-based studies. Brain 2009, 132 Pt 2, 537–543.

Stapf C, Mast H, Sciacca RR, Choi JH, Khaw A V, Connolly ES, et al. : Predictors of hemorrhage in patients with untreated brain arteriovenous malformation. Neurology 66:1350–5, 2006

Hernesniemi JA, Dashti R, Juvela S, Väärt K, Niemelä M, Laakso A : Natural history of brain arteriovenous malformations : a long-term follow-up study of risk of hemorrhage in 238 patients. Neurosurgery 63:823-829-831, 2008
Kim, H., Al-Shahi Salman, R., McCulloch, C. E., Stapf, C., & Young, W. L. Untreated brain arteriovenous malformation : Patient-level meta-analysis of hemorrhage predictors. Neurology, 83(7), 590–597. 2014.

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